Pour l'histoire de votre personnage, nous vous demandons un minimum de 400 mots. Bonne rédaction ! ◆◆◆◆
L’an 1663Alix était assise au petit salon en compagnie des connaissances de sa mère. Elle venait de terminer de jouer une composition de Claude Lejeune, un de ses compositeurs préférés. La connaissant par cœur, elle fit mine d’être concentrée, tout en écoutant la conversation des dames, dont la plupart faisaient partie d’un nouveau genre de précieuses qui aimaient discuter de poésies et d’arts. La jeune femme prenait toujours plaisir à les entendre converser, car leurs sujets étaient souvent des plus intéressants, comme celui dont elles conversaient en ce moment.
- Êtes-vous allez voir la dernière pièce de Molière? demanda la Marquise d'Argenson en buvant une gorgée de délicieux chocolat.
- La Critique de l’École des femmes? Certes! Marquise, nous avons adoré! répliqua la mère d’Alix. Autant les partisans étaient pleins d’esprits et de bonnes intentions autant que leurs adversaires étaient d’un ridicule à me faire mourir de rire. N’est-ce pas Alix?
Alix sourit doucement en se tournant vers Béatrice et elle acquiesça en répondant :
- Oui, mère. J’ai aimé cette dualité et j’ai en effet beaucoup ri. Molière a su très bien représenter notre réalité de salon, tout en s’attaquant à nos mœurs avec brio. Une étincelle espiègle fit briller le regard émeraude de la belle jeune que toutes écoutaient avec attention.
- Je me souviens de cette réplique que le personnage du marquis joué par notre dramaturge a citée : « Il ne faut que voir les continuels éclats de rire que le parterre fait. Je ne veux point d'autre chose pour témoigner qu'elle ne vaut rien. »-Hahaha! S’esclaffèrent les femmes en s'éventant frénétiquement.
- Vous avez une excellente mémoire, jeune fille. Je ne pourrais même pas citer le quart de cette pièce.
- Le quart vaut mieux que rien, Marquise. Répliqua Alix avec esprit tout en se levant pour aller s’assoir au côté de sa mère. La suivant du regard, la Marquise acquiesça d’un sourire.
- C’est juste.
- Ma Alix a en effet une mémoire remarquable! Renchéris Béatrice en contemplant avec fierté la jeune femme de 18 ans. Nous avons pris soin de l’envoyer à l’abbesse des Dames de Saintes pour qu’elle reçoive la meilleure éducation possible.
- C’est un excellent choix. De nombreuses femmes de la noblesse ont fait leur éducation au sein de cette institution et elles se sont démarquées à la cour. Je suis convaincue qu’il sera de même pour votre fille.
- Je crois qu’il ne suffit pas d’une bonne éducation pour attirer les faveurs de la haute société, ou mieux celles du Roi. Affirma Alix en pesant ses mots.
- Ah non? Qu’est-ce que cela prend selon vous? Demanda la Marquise d'Argenson intriguée. Alix eut alors un sourire irrésistible et elle répondit audacieuse :
- De l’esprit, du courage et de la séduction. Si une femme ne possède pas ces trois qualités, elle ne pourra jamais monter les échelons ni se protéger des intrigues qui règnent à la cour.
À cette réplique, les femmes se prirent à s’éventer plus frénétiquement tout en acquiesçant d’un petit sourire. Cette jeune femme était aussi belle qu’intelligente ce qui risquait de causer bien des émois parmi les courtisans et de la jalousie parmi leurs dames. La Marquise d'Argenson soutint alors le regard de cette perle prometteuse en affirmant :
- Vous me plaisez, Alix. Il est rare qu’une personne aussi jeune soit consciente de ces choses et biens que votre opinion demeure directe, elle est véridique. Sans plus d’hésitation, la noble proposa : Comme vous êtes sans doute au courant, la cour se déplace à Fontainebleau le mois prochain. Aimeriez-vous m’y accompagner? Je pourrais vous présenter à diverses de mes connaissances.
- J’en serais honorée, Marquise. Répondit Alix d’un large sourire éblouissant, tandis qu’elle entendit sa mère soupirer de soulagement.
De fil en aiguille, Béatrice avait réussi à intégrer le cercle de ces femmes savantes afin d’entretenir des contacts de choix pour assurer l’avenir de sa fille. Parallèlement, son mari avait investi leur fortune dans leur hôtel parisien, qui servait de lieu de rassemblant, ainsi que dans la dot d'Alix, leur unique enfant. Or, parmi ces quelques femmes de la noblesse, la Marquise d'Argenson était la seule de leurs connaissances à appartenir à un rang élevé et elle avait justement espéré qu’Alix attire son attention, voire son affection. À présent, il restait à lui trouver un époux appartenant à la haute noblesse, afin que leur famille puisse rembourser leurs dettes et se démarquer à la cour. Un projet glorieux et prospère, qui malheureusement, n’allait jamais avoir lieu…
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L’an 1667
La jeune femme suivit d’un air las les deux hommes transportant une commode qui avait meublé sa chambre. Suite à la mort de son père, et un an après de sa mère, elle s’était affairée à entretenir seule ce bâtiment qui les avait ruinés plus qu’enrichi.Comme les choses auraient été différentes si elle avait épousé le Comte d'Auvergne, qui avait été ébloui autant par la beauté que par la dot de la jeune femme. D’un soupir, Alix chassa ce souvenir de sa tête et elle se consacra à lire une missive de la Marquise d'Argenson, la seule qui avait gardé contact avec elle. Alix fut surprise d'apprendre que la noble ait parlé d’elle au nouveau lieutenant-général de police de Paris qui souhaitait la rencontrer. À l’instant où la jeune femme se demanda pourquoi cet homme important voulait l’entretenir, une personne entra dans l’hôtel à pas discret. Levant son grand regard vert, elle demeura interdite devant cet inconnu qui était grand, vêtu sobrement, portant une longue perruque brune et une fine encadrant une bouche pleine.
- Demoiselle Alix de Saint-Aignan? Demanda-t-il d’une voix grave qui fit un peu frémir Alix.
- C’est moi. À qui ai-je l’honneur?L’étranger ne répondit pas tout de suite, il se contenta de la contempler d’un sourire satisfait. Même vêtue d’une robe simple, elle était telle qu’on l'avait décrite, d’une beauté à faire pâlir de jalousie la favorite du Roi.
- Gabriel Nicolas de la Reynie, Lieutenant-général de police de Paris. Répondit-il en souriant. Alix écarquilla légèrement les yeux tout en déposant la missive de la Marquise. Reprenant contenance, elle eut un beau sourire en lui tendant la main.
- Monsieur de la Reynie, je suis ravie de faire votre connaissance. Permettez-moi de vous féliciter pour votre nouveau poste. J’ai entendu dire que vous êtes le premier à avoir obtenir de telles responsabilités.L’homme s’avançant pour lui faire un baisemain tout en plongeant dans ces yeux d’un vert rarissime. Cela dura quelques instants puis il répondit d’un petit sourire :
- L'on vous a bien renseigné. Vous vous intéressez donc à ma personne?
- Je m’intéresse à tout ce qui concerne la vie à la cour, Monsieur, ainsi qu’à ceux qui la protègent. - Vraiment? Pourquoi cela?
- Pour une raison particulière, mais avant puis-je vous offrir un rafraichissement?- Volontiers.
Continuant de sourire, la jeune femme le conduisit au petit salon où autrefois il fut réservé aux conversations mondaines.
- Votre hôtel est magnifique, tout comme sa propriétaire. Complimenta le lieutenant avec sincérité, faisant fi de la poussière recouvrant les meubles. Sentant ses joues rougirent, Alix se détourna du regard scrutateur pour verser du thé infusé, ses dernières feuilles restantes.
- Merci, mais malheureusement, je compte le vendre. Je ne peux plus l’entretenir seule.- Oui, j’ai appris la perte de vos parents et de vos biens. J’en suis désolé. Dit de la Reynie avec empathie. La jeune femme eut un sourire tout en s’assoyant devant son mystérieux interlocuteur.
- Les temps sont difficiles, mais je vais m’en sortir. Répondit-elle simplement en portant sa tasse à ses lèvres sensuelles.
Elle n’était pas du genre à se plaindre, mais à survivre quoiqu’il arrive. Sa force de caractère, héritage de ses nobles ancêtres, se faisait sentir à travers cette simple réplique, ce qui persuada de la Reynie qu’elle était la femme qu’il cherchait. Reste à voir si elle était aussi belle qu’intelligente. Déposant sa tasse sur la table, il dit :
- J’en suis certain, mais je me rends compte que vous n’avez pas répondu à ma précédente question. Pourquoi vous intéressez-vous à la cour et à ceux qui la protègent?
À cette question, Alix pencha légèrement la tête sur le côté en répondant avec esprit :
- Car la personne qui détient l’information détient le pouvoir. À cette réponse inattendue, le lieutenant eut un regard épaté qu’Alix remarqua. Quelque chose lui disait que de la Reynie n’était pas un homme que l’on surprenait facilement. Elle ressentit soudain cette envie de vouloir l’impressionner davantage. D’un sourire ingénu, Alix ajouta :
- Voyez-vous, j’ai failli devenir Comtesse pour la simple et bonne raison que j’ai su choisir et convaincre les bonnes personnes, dont la Marquise d'Argenson, notre amie commune. Elle m’a d’ailleurs informé de votre venue. Quelle en est la raison?- Je viens pour un échange de services, demoiselle.
- De quelle sorte? demanda Alix intriguée.
Pour toute réponse, le lieutenant eut un large sourire et soutenant son regard émeraude, il but une gorgée de thé.
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L'an 1672Servir de la Reynie avait été gratifiant. Non seulement la jeune femme avait retrouvé sa vie précédente, fait de belles parures et de soirées mondaines, mais en plus, son existence était pigmentée par l’intrigue et le danger. Être espionne était une profession dangereuse, mais elle adorait cela et elle faisait tout en son pouvoir pour recueillir des informations pertinentes. Usant de séduction et de coquetterie, Alix est devenue d’une efficacité redoutable jusqu’à créer de fausses pistes pour ceux qui la soupçonnaient. Il était loin le temps où elle voulait devenir Comtesse…à présent, elle était beaucoup plus qu’un titre. Dans l’ombre, elle était celle qui servait la France en protégeant le Roi d’ennemis éventuels…