Pour l'histoire de votre personnage, nous vous demandons un minimum de 400 mots. Bonne rédaction !

Vous raconter mon histoire, ma vie ? Est-ce bien nécessaire ? Mon histoire est des plus banales vous savez, et je crains de vous ennuyer. Mais si vous insistez, je vais tenter de faire court ...

D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été attirée par la beauté de la nature, les fleurs, les plantes et même les arbres. C'est sans doute de famille puisque mes parents étaient férus de jardinage. Ainsi un grand nombre de végétaux de toutes sortes était cultivé sur nos terres et ce, grâce à de nombreux jardiniers. C'était ainsi qu'ils faisaient vivre notre famille puisque seuls les revenus de notre titre de noblesse n'y suffisaient pas.
Pour la petite fille que j'étais, cela n'avait aucune importance puisque je passais des heures dans les serres à seconder ma mère ou mon père, ou dans les jardins avec les ouvriers, apprenant de chacun avec la vivacité et l'innocence de l'enfance. Je récoltais certaines graines pour les faire pousser dans mon petit jardin personnel ou bien j'expérimentais les hypothèses les plus farfelues comme essayer de transformer le grand saule qui trônait au milieu d'un carré de pelouse, en un saule pleureur en plantant des oignons entre ses racines, parce que j'avais entendu les cuisinières se plaindre en épluchant les-dits oignons qui les faisaient pleurer ...

Cette enfance atypique pour une jeune fille de bonne famille m'a conduite à épouser, à dix-neuf ans à peine, Henri d'Albert duc de Dampierre, un autre passionné d'horticulture qui cherchait à développer sur ses terres le même genre de pépinière que ma famille. J'étais à ses yeux l'épouse parfaite pour l'aider à entreprendre cette transformation. Si lors de nos premières rencontres, j'avais trouvé cet homme des plus charmants, même s'il était un peu plus âgé que moi, j'ai vite déchanté car entre les murs de notre demeure c'était un mari possessif, exigeant. Il n'a jamais utilisé la violence physique envers moi, mais les mots sont des armes à double tranchant. Durant notre mariage j'ai perdu pratiquement toute ma confiance en moi, toute mon assurance sapées par ses diatribes déstabilisantes. Je me réfugiais dans les jardins, et avec l'aide de Jonas le contremaître, je me consolais auprès de mes chères roses, et des autres fleurs que nous cultivions ensemble.

Pendant l'hiver 1668, une mauvaise fièvre a terrassé Henri pendant des semaines. Il était en proie à de terribles quintes de toux qui lacéraient sa gorge et ses poumons. Rien ne parvenait à les atténuer, ni les décoctions apaisantes que je lui préparais, ni les saignées du charlatan de médecin qu'il envoyait chercher à toute heure du jour ou de la nuit. Affaibli, fiévreux, il fut emporté par une dernière quinte déchirante, terriblement violente, qui s'est terminée en un râle sifflant d'agonie. Incrédule, abattue, je me suis terrée plusieurs semaines au château, errant de pièces en pièces tel un spectre, une âme désorientée.

Et puis, le printemps est arrivé sonnant le renouveau, la renaissance de la nature, et la mienne. Comme les jardins, j'ai repris le cours de ma vie, libérée des chaînes de ce mariage dans lequel je n'avais trouvé aucune satisfaction. Mon hiver était terminé, enfin ! Depuis, avec Jonas nous poursuivons notre entreprise, je n'ai pas peur de mettre les mains dans la terre, au contraire j'y puise réconfort et énergie. C'est plus une passion qu'un travail pour moi, même si aux yeux de certaines de nos fréquentations, c'est une tâche des plus ingrates et sales, qui me déshonore.

La réputation des plantes et arbres de Dampierre n'est plus à faire, Henri commerçait déjà avec André Le Nôtre et ses assistants, Jonas a repris le flambeau le temps que je me familiarise avec la gestion et que je sois capable de recevoir des acheteurs. Les commandes se bousculent et nous manquons parfois de main d'oeuvre, mais la nuit venue, je me couche épuisée et satisfaite du labeur accompli.

Désormais je me rends régulièrement à la cour, à Saint Germain, pour représenter le nom de Dampierre que je suis la seule à porter maintenant. Je sais que certaines langues de vipère m'ont surnommée la marchande de fleurs, par mépris, par jalousie sans doute. Mais je m'en moque, j'ai acquis mon indépendance, ma chère liberté et je refuse que quiconque la remette en question. Je suis veuve, et alors ? Les hommes sont persuadés qu'une femme sans mari est un bateau sans gouvernail, je suis la preuve vivante que c'est une hérésie et j'ai bien l'intention de poursuivre ma vie et mes affaires comme je l'entends.

Aujourd'hui je reçois l'un des responsables des jardins de Saint Germain, Jonas m'a prévenue qu'il vient pour une commande importante, et que si je le désire, il m'assistera pendant ce rendez-vous ...