Ma tendre amie,

Comme vous le savez, nos destins furent liés par nos parents alors que nous n’étions encore que des enfants. A votre naissance et alors que je n’étais âgé que de trois ans, mon père m’expliqua que je devais faire très attention à vous, car vous étiez destinée à devenir mon épouse, la femme avec qui j’allais passer le restant de mes jours… Malheureusement je ne pris pas ce conseil à la lettre et pendant des années j’ai préféré la compagnie de vos frères à la vôtre, il nous arrivait parfois de partir de jouer des heures, que dis-je des journées entières. Et lorsque nous partions à l’aventure, dans les Bois qui entouraient Fontenille ou Mirabel, je ne prenais pas le temps de penser à vous, bref vous ne me manquiez pas… Qu’est-ce que je pouvais être idiot ! Car aujourd’hui, il ne se passe pas un seul instant sans que je pense à vous mon amour.

Quel chemin parcouru ! Car vous êtes vite devenue mon amie, ma tendre amie, ma meilleure amie ! Mais étrangement, ce sentiment pourtant positif, ne tarda pas à nous séparer, toi en te poussant vers les Arts et moi dans les bras de femmes auxquels je n’aurais jamais dû prêter attention. Seules les nuits d’orage parvenaient à nous rassembler. Je me souviens bien très bien de ces soirées, le grondement du tonnerre, la pluie, la grêle qui tape sur le toit de Mirabel et vous tremblante entre mes bras. Comme si Dieu le Père essayait de nous réunir. Est-ce grâce à lui qu’une fois à Paris notre amitié se transforma enfin en amour ? Je n’en sais rien ! Mais j’ai envie de le croire, car cela me permis d’avoir deux beaux enfants, la plus belle chose qu’on homme puisse rêver d’avoir en ce bas monde.

Aujourd’hui mon rôle de Grand Veneur m’empêche de passer du temps aux côtés de ces anges, aux côtés de vous mon ange, mais je puis vous assurer que mon cœur ne bat que pour vous et qu’il ne se passe pas une journée, sans que l’image de votre visage, de vos grands yeux, de votre sourire ne vienne hanter mon esprit ! Vous n’imaginez même pas combiens de gibiers vous doivent la vie… Un jour un vieil homme m’a dit qu’en amour comme en chasse, on n’attrape pas toujours ce que l’on attend ! Et je crois bien qu’il avait raison… à ce sujet ne vous excusez plus, ne me demandez plus pardon pour cette première nuit que nous avons partagés, quoi de plus normal qu’une dame qui montre son amour à son époux !? Le seul à devoir s’excuser c’est moi ! Moi pour m’être comporté comme le pire des goujats à l’époque où vous n’attendiez sans doute qu’à être réconforter ou conforter…

Soyez sure ma mie, que je vous aime d’un amour sincère et que je n’aime que vous, c’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’aimerais que vous quittiez notre demeure parisienne afin de me rejoindre pendant quelques jours dans la demeure de sa Majesté le Roi Louis XIV. Peut-être qu’en ces lieux idylliques, vous trouverez de l’inspiration pour vos peintures.